Nous sommes le 30/04/2020, en pleine crise du coronavirus. Un mois et demi après le début du confinement qui a mis une bonne partie de l’économie à l’arrêt, et à 11 jours du déconfinement annoncé pour le 11 mai.

« Juste après, on fait quoi », c’est un mouvement qui a émergé au début du confinement et qui vise à s’inspirer, réfléchir et trouver ensemble les modèles économiques de demain : https://www.linkedin.com/company/juste-apr%C3%A8s-on-fait-quoi/

« Juste après, on fait quoi », c’est un forum ouvert qui, sous l’impulsion de 10 joyeux organisateurs-facilitateurs-change makers, a rassemblé 180 personnes du 23 au 28 avril, pour réfléchir et partager sur l’après. Explorer des sujets pour faire émerger des nouveaux modèles économiques plus vertueux pour demain.

Etant moi-même organisatrice et facilitatrice de forums ouverts, j’ai eu beaucoup de joie à voir que ce format est très facilement transposable à distance, à condition de l’étaler sur plusieurs jours. Et beaucoup de joie à être, pour une fois, du côté des participants. 😊

Pour ma part, parmi les 31 sujets explorés pendant ces 6 jours, j’ai contribué à 4 sujets et j’en ai animé un que j’avais proposé : Comment amener et valoriser dans les organisations des temps de connexion à soi, aux autres et à notre environnement, quand la course folle repartira ?

Ce sujet m’est particulièrement cher, car j’ai une vraie préoccupation pour l’après. Oui, l’économie a souffert et bon nombre d’entreprises sont dans de grandes difficultés. Pour autant, il me semble urgent de ralentir. De prendre le temps, ne pas se précipiter et repartir à 200 à l’heure pour rattraper le temps perdu quand l’heure du déconfinement aura sonné.

Les salariés ne sont pas prêts à repartir dans le rythme effréné d’avant. Cette période a changé notre relation au temps. Pour tous ceux que cette période a mis à l’arrêt, en chômage partiel, il va y avoir un « clash » entre le rapport au temps pendant le confinement et le rythme qui va repartir. Un clash entre l’envie d’un rythme plus lent et plus en phase avec les rythmes biologiques individuels auquel ils auront goûté pendant le confinement et le système qui va pousser à repartir vite et fort.

La réalité est bien différente pour d’autres, qui sont surmenés entre le télétravail et la gestion de la famille et de l’école à la maison. D’autres encore s’investissent corps et âme pour sauver leur entreprise, au bord de l’épuisement voire du burn-out.

Des réalités bien différentes et qui pour autant doivent toutes être prises en compte.

Comment envisager la reprise avec des salariés qui, pour certains, auront été complètement déconnectés de leur travail et de l’entreprise pendant 2 mois, et qui, pour d’autres, seront au bord de l’épuisement ? Qui pour beaucoup ont peur de l’avenir, peur des conséquences de la crise, peur de perdre leur emploi.

Il y a de vrais risques psycho-sociaux qu’il ne faut pas minimiser. Pour tous : salariés, managers, dirigeants.

Il me semble essentiel de prendre le temps de se reconnecter, de partager ce que l’on a vécu, individuellement et collectivement.

Cette période va très vraisemblablement amener également dans son sillage une crise de sens. Comme cela a été exprimé pendant la clôture du forum ouvert : « Le ralentissement est un cadeau pour se connecter à ses véritables besoins. » « Se reconnecter à soi, à ce qui est le plus important ici et maintenant. »

Comment re-mobiliser les collaborateurs, les ré-engager dans ce contexte ?

J’avais envie de vous partager ici différentes pistes d’actions qui ont émergé des ateliers auxquels j’ai participé pendant ce forum ouvert et que je retiens car elles correspondent à la contribution que j’ai envie d’avoir, pour aider les organisations que j’accompagne à mieux repartir (mieux et pas plus vite) :

  • Créer un sas entre l’avant et l’après pour accueillir l’humain : comment les salariés ont-ils vécu la période ? de quoi ont-ils envie ?
  • Accompagner les managers de proximité qui vont se retrouver écartelés, avec d’un côté les injonctions du top management à repartir et rattraper le chiffre d’affaires perdu, et de l’autre, la réalité humaine. Les aider à développer leur capacité d’écoute, leur empathie, leur intelligence émotionnelle.
  • Ouvrir des espaces de parole et d’écoute pour tous, depuis les salariés jusqu’aux dirigeants, pour permettre l’accueil des peurs, des doutes, des difficultés et pouvoir ensuite mobiliser son énergie pour envisager l’avenir (cf courbe du deuil ou du changement de Kübler Ross).
  • Tirer individuellement et collectivement les enseignements de cette période : qu’est-ce qu’on a envie de garder dans ce qui a bien fonctionné pendant le confinement, et à l’inverse, que veut-on changer ou arrêter dans nos modes de fonctionnement individuels et collectifs ? Sur quoi peut-on s’alléger ? (cf matrice KISS : Keep, Improve, Start, Stop)
  • Organiser des forums ouverts dans les entreprises pour permettre la reconnexion et les échanges pour construire l’après. Je retiens cette phrase de l’un des participants à l’issue de ce forum ouvert, qui témoigne avoir reçu, grâce à ce forum, un « shoot d’énergie » : « Le forum ouvert devrait être reconnu comme une action de santé publique ! » 😊
  • S’appuyer sur les Hommes pour rebondir : « Quand la valeur financière s’écroule, il ne reste que la valeur humaine. »
  • Se relier au sens (le sens de son métier, sa raison d’être et celle de son entreprise), facteur d’engagement, de motivation et de créativité.
  • Redéfinir collectivement la Vision de l’entreprise, une Vision qui réponde au besoin de sens et d’utilité des collaborateurs.
  • Prendre des temps de connexion individuels et collectifs pour faire émerger la créativité et l’innovation, dont les organisations vont avoir plus que jamais besoin pour faire face à la complexité et à l’incertitude (via par exemple des méthodes comme la Theorie en U ou la collaboration générative / cercles de résonance).
  • Donner la voix aux clients, aux usagers : que souhaitent-ils ? Ce sont eux au final à qui l’entreprise s’adresse.
  • Partager des récits pour inspirer : quel monde a-t-on envie de (re)construire ?

En conclusion, j’ai l’intime conviction que cette crise est une opportunité incroyable qui nous est offerte pour nous réinventer, depuis notre façon de travailler ensemble jusqu’à nos business modèles. Sachons saisir cette opportunité pour ne pas repartir comme avant. Sachons voir non pas le temps perdu mais le temps gagné pour repartir sur d’autres bases, plus pérennes. Reposer les fondations. Comme partagé par l’un des participants du forum ouvert, cette crise est OUF, en ce sens qu’elle nous donne une Occasion Unique de Faire.

Ça vous parle ? Envie d’en échanger et de réfléchir à comment mieux repartir ? Parlons-en ! https://keychange.fr/contact/

Mercredi 8 avril 2020. Voilà maintenant 3 semaines et demi que nous sommes confinés chez nous. Bientôt un mois…

Vendredi dernier, une amie m’invitait à me poser la question suivante : « Qu’est-ce que ce confinement change en moi ? », partant de cet adage qui dit que « parfois, les choses que nous ne pouvons pas changer finissent par nous changer ». Alors j’ai pris le temps de me poser sur cette question et vous partage ici mes premières réflexions…

La « crise du COVID 19 », ce petit virus qui a en très peu de temps tout mis à l’arrêt. Depuis nos vies jusqu’à l’économie mondiale. C’est comme si quelqu’un avait, malgré nous, appuyé sur le bouton « pause » de la télécommande pour arrêter le film que nous étions en train de jouer. Pour passer de la posture de personnages de ce film (et je n’utilise pas volontairement ici le mot « acteurs ») à celle de spectateurs. Pour prendre le temps de regarder ce film. Un film qui parle de la course folle de nos vies. Un film qui nous donne notre dose d’adrénaline, nous donnant ainsi l’impression (l’illusion ?) de vivre. Oui, de vivre une vie trépidante où nous courons de réunion en réunion, où nous sommes toujours dans l’action. Mais est-ce cela le sens de la vie ?

Cette crise nous impacte tous différemment. Il y a ceux qui sont en première ligne, qui se donnent corps et âme chaque jour, pour aider, soigner. Il y a ceux qui continuent d’aller travailler pour répondre à nos besoins de première nécessité (personnel travaillant dans les commerces alimentaires, pharmacies, éboueurs, facteurs, et bien d’autres encore). Il y a tout le corps enseignant qui s’adapte, qui télétravaille, pour continuer à transmettre à nos enfants. Il y a tous les salariés qui télétravaillent aussi, tout en essayant de gérer au mieux l’impact de cette crise sur leur entreprise ainsi que leur vie familiale, pour ceux qui ont des enfants. Et puis il y a aussi ceux dont l’activité professionnelle s’est arrêtée du jour au lendemain. Les commerçants dont les commerces ne répondent pas à des besoins de première nécessité, les restaurateurs, un bon nombre d’indépendants dont je fais partie, et bien d’autres encore. Pour autant, je pense que pour tous, même si les impacts sont différents, cette crise a à nous transmettre des enseignements précieux.

Pour ma part, je me suis donc retrouvée sans activité du jour au lendemain. Les missions clients arrêtées, reportées. J’ai très bien vécu la première semaine du confinement, cette pause bienvenue dans ma vie. Prendre le temps de profiter de mon jardin, du soleil, de mes enfants, jouer, peindre, lire, écrire, réfléchir, méditer, faire du yoga. Il n’était plus question de FAIRE, juste d’ETRE, et c’était bon. Doux, agréable. Une pause dont mon corps et ma tête avaient sans doute besoin.

Puis est venue la deuxième semaine, avec beaucoup de « tentations ». Le besoin (ou l’envie ?) de FAIRE, d’être actrice, de « profiter » de cette période pour « faire plein de choses » : contribuer, échanger, apprendre, découvrir. Et cette deuxième semaine a été à l’opposée de la première, avec beaucoup de rendez-vous en visio-conférence, pour travailler à la construction du programme de la prochaine Fabrique du Changement de Lille, découvrir comment allier jeux et développement personnel / développement d’équipe avec « le labo des jeux », et aussi pour échanger, réfléchir à comment « faire ma part » et être active / actrice dans cette période. Au final, une deuxième semaine où je me suis presque sentie « débordée », par contraste avec la première semaine, tant j’étais dans le FAIRE. Comme « prise à la gorge », en manque de respiration.

En même temps que je vivais cela, je travaillais à la mise en place d’un atelier sur l’intelligence émotionnelle, que j’ai proposé en troisième semaine. En préparant cet atelier, je me suis vraiment posée sur ce que je ressentais pour aller identifier les besoins que je nourrissais, et ceux, à l’inverse, qui n’étaient pas nourris. Ce qui m’a permis de mettre le doigt sur mon besoin de trouver en moi cet équilibre entre l’ETRE et le FAIRE. Et de comprendre que l’équilibre, ce n’est pas 10% à ETRE pour 90% à FAIRE, mais un réel équilibre. 50-50. Comme la respiration finalement, où l’inspir est égal à l’expir. Au-delà de comprendre que j’avais ce besoin, j’ai pu expérimenter en quoi cet équilibre est bénéfique. Pour moi, déjà, mais aussi, je pense, pour tout un chacun. 

Quand je suis dans l’ETRE, je suis dans l’instant présent. Je suis à l’écoute de mes émotions, mes ressentis, mes élans spontanés. ETRE moi avec moi, cela peut passer pour moi par la méditation, le yoga, l’écriture. ETRE moi avec les autres, c’est un état que je contacte par exemple quand je joue avec mes enfants ou quand j’ai une discussion authentique et profonde avec des amis. Une connexion d’ETRE à ETRE. Et enfin, ETRE moi avec mon environnement, avec la planète, passe pour moi notamment par l’observation et l’écoute de la nature. Peu importe les moyens, qui sont propres à chacun pour être dans cette qualité d’ETRE. Ce qui importe, c’est l’intention. Ne pas chercher à FAIRE, à obtenir un résultat, à être efficace, à optimiser mon temps. Simplement jouir de l’instant présent. C’est cela pour moi ETRE.

Et j’ai pu observer depuis une semaine que cet état d’ETRE me permet de FAIRE, d’agir en conscience, à partir de mes élans, de mon cœur, et non pas en mode « pilote automatique ». La « to do list » quotidienne que je pouvais m’imposer (pour au final n’en faire peut-être que 30% ou 50%) est devenue la « tout doux liste », pour reprendre l’expression d’une amie.

J’ai pu observer que lorsque je suis dans cette qualité d’ETRE, je suis pleinement dans la conscience de ce que je vis et de ce qui vit en moi, mettant en exergue le sens et l’essence, l’essentiel. Me permettant de faire le tri, de me réajuster en permanence dans un FAIRE équilibré, ajusté, aligné avec ce qui fait sens pour moi, ce qui m’est essentiel. Et permettant à ma créativité d’émerger. Le principal indicateur de cela étant pour moi le fait de ressentir de la joie.

Ma prise de conscience, c’est que cet équilibre me semble plus que jamais indispensable. L’équilibre entre l’ETRE et le FAIRE. Pour moi. Pour nous tous. Pour notre planète. Pour reprendre l’image de la respiration, inspirer / me laisser inspirer (ETRE) par ce qui émane de mon intériorité et de ma connexion aux autres et à mon environnement, pour pouvoir expirer (FAIRE) en conscience. En conscience de moi (mes émotions, mes besoins, mes élans), en conscience des autres et en conscience de mon environnement. Cet équilibre me semble indispensable pour agir avec discernement et justesse. Ne pas agir pour « dépiler » une « to do list » qu’on s’impose, pour s’occuper ou pour remplir ses journées, comme la société de consommation nous l’a appris. Mais agir en conscience de ce qui est bon est juste pour nous, pour les autres et pour notre environnement.

J’ai pris conscience pendant ce confinement que ne rien FAIRE n’était pas synonyme de non impact. Il me semble que de rester ancré et serein au travers d’une qualité d’ETRE dans la période que nous traversons est indispensable pour contrebalancer toute l’agitation extérieure ambiante qui parle aussi de peurs. A l’image d’un phare qui est simplement posé, ancré, sur la terre ferme, qui ne « fait » rien, hormis éclairer, quand c’est l’agitation en pleine mer et que les marins s’activent pour traverser la tempête. A nouveau, tout est une question d’équilibre.

Dans ce monde où les « bons » KPIS parlent d’efficacité, de productivité, de rentabilité, j’ai envie de questionner avec cet article sur l’efficacité réelle de nos actions. La « vraie » efficacité ne doit-elle pas intégrer la notion de durabilité ? Sous peine de voir tous nos efforts réduits à néant en un rien de temps, comme nous le montre la crise que nous traversons aujourd’hui.

Je suis intimement convaincue que les choix les meilleurs sont ceux qui sont bons et justes pour nous, pour les autres et pour notre planète. D’où l’importance de trouver cet équilibre fragile entre l’ETRE et le FAIRE. Savoir s’arrêter, faire silence, pour pouvoir être à l’écoute de nos ressentis, de nos élans, de cette petite voix intérieure qu’on peut appeler l’intuition, mais aussi à l’écoute des autres et de notre environnement, pour agir avec discernement et justesse. Cela nécessite de ralentir, de marquer des temps de pause, comme celui que nous vivons en ce moment. Pour sortir de la roue du hamster, arrêter de courir sans plus même savoir où l’on va, sortir du mode « pilote automatique ».

Alors oui, pour l’instant, je n’ai plus de « travail ». Mais j’ai envie de dire MERCI pour cela, merci pour cette crise qui me permet de rééquilibrer l’ETRE et le FAIRE. De ressentir en moi combien cet équilibre si fragile est tellement important. Vivre cette expérience en conscience pour en imprégner chacune de mes cellules, et je l’espère, ne pas repartir « à fond », après, dans la roue du hamster.

Loin de me sentir privée de ma liberté, j’ai au contraire le sentiment d’être plus libre que jamais. Car la véritable liberté n’est-elle pas celle d’agir en conscience, en choisissant à chaque instant chacune de nos actions, en répondant chaque jour à cette question :

Au service de quoi ai-je envie de mettre mon énergie aujourd’hui ?

Cet article vous a plu ? N’hésitez pas à le partager ! 🙂